Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur

Adrian Schiess

23 May - 31 Aug 2014

© Domaine de Kerguehennec, 1993. Photo : DR
ADRIAN SCHIESS
Peinture
23 mai — 31 août 2014

Exposition réalisée en partenariat avec la galerie Nächst St. Stephan Rosemarie Schwarzwälder et le Consulat général de Suisse, Marseille. Avec le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture.

Exposition réalisée en partenariat avec la galerie Nächst St. Stephan Rosemarie Schwarzwälder et le Consulat général de Suisse, Marseille. Avec le soutien de Pro Helvetia, Fondation suisse pour la culture.

« Un processus à l’épreuve du temps »

Adrian Schiess, artiste suisse allemand, qui vit et travaille désormais dans le Jura Suisse n’est pas un inconnu dans notre région où il vécut pendant près de vingt ans à Mouans-Sartoux dans une discrétion absolue, en totale harmonie avec ses peintures et l’univers intérieur et extérieur de sa maison-atelier. C’est donc en marge de la scène artistique de notre région qu’Adrian Schiess a bâti une œuvre majeure au niveau international, dont on a pu découvrir l’étendue du travail, de la Biennale de Venise au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris ou de Saint-Étienne plus récemment. En 1996, le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur avait procédé à l’acquisition de deux œuvres importantes, Travaux à plat (Peinture) et Couleurs (1994) ; la première rejoint aujourd’hui l’ensemble exceptionnel d’œuvres en provenance de collections publiques et privées françaises rassemblées pour cette exposition.

Adrian Schiess occupe une place à part dans le paysage de l’art contemporain. C’est ce que l’on se dit une fois encore en regardant l’ensemble de ses Peinture. Lui vous répondra qu’il n’en a pas réellement, que ce n’est pas son affaire. D’une certaine manière, il s’est toujours situé hors des sentiers battus. On sait quel sens cette affirmation peut revêtir quand elle est énoncée par un homme tout entier voué à sa peinture, à ce projet qui s’apparente à une véritable quête spirituelle. On devine aussi à quels malentendus elle peut donner lieu si elle n’entre pas en résonance avec une lecture attentive de son travail. Pour Adrian Schiess, peindre n’a jamais consisté à vouloir bâtir une œuvre ; il s’est agi avant tout de mener à bien un questionnement vital dont les fins ne se dévoilent à lui qu’au fur et à mesure de sa progression. L’œuvre est là pourtant, prolifique, déclinée dans plusieurs genres et supports (peintures, photographies, vidéos, livres, éditions), et d’une grande cohérence.
À suivre le cheminement de ce solitaire dont le propos est largement voué à la restitution scrupuleuse de son « aventure intérieure », le spectateur ne peut avoir avec ses œuvres qu’une relation difficilement exprimable, quelque chose qui tient du compagnonnage et probablement aussi d’une forme de méditation. On est très vite convaincu que l’œuvre de cet artiste, humble, discret et opiniâtre, a beaucoup à dire à ceux qui n’ont pas encore approché ses œuvres ou les ont trop rapidement observées. Elles sont une passionnante invitation à repenser notre relation au monde, notre vision de nous-mêmes. Depuis plus de vingt ans, Adrian Schiess poursuit une aventure artistique et spirituelle qui ne s’est jamais détournée de sa direction initiale et qui nous permet aujourd’hui d’éprouver avec force la cohérence profonde de l'homme et d’une œuvre.

L’exposition présentée au FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur s’essaie à remonter le cours du temps, ne cédant pas aux critères de la rétrospective mais tentant d’apporter à la question de l’écriture d’une exposition, une réponse originale et inédite : celle d’une « exposition d’auteur », conçue comme un dispositif, comme une forme en soi dont seul l’artiste possède la trame conceptuelle et narrative – « un processus à l’œuvre ». Ces mots nous éclairent particulièrement sur la manière dont Adrian Schiess s’est emparé de cette invitation à exposer, comme une forme à part entière, au même titre que l’écriture d’un roman ou le tournage d’un film.
L’exposition ici n’est pas un discours sur l’art, elle n’est pas une leçon de musée ni un simple accrochage d’œuvres d’époques différentes. Ces grands panneaux de bois ou d’aluminium recouverts de peinture industrielle, la plupart du temps en de subtils dégradés, sont mis à plat sur des tasseaux, reflétant ainsi l’espace et l’architecture dans lesquels ils sont donnés à voir. L’exposition devient bel et bien une forme narrative avec laquelle l’artiste déroule un récit, le récit de sa peinture, de ses « Fläche Arbeiten », ainsi nommés jusque dans les années 1990 et qui s’intitulent désormais tout simplement « Peinture », comme une évidence.
Cette exposition fournit à Adrian Schiess l’occasion de raconter son histoire avec des « tableaux » comme autant de chapitres d’un livre ou comment donner à voir la véritable quête des Peinture par les moyens de l’exposition comme dispositif narratif. Si l’agencement des « tableaux » donne à l’artiste le montage d’une fiction visuelle, reste à charge pour le spectateur d’en continuer seul l’aventure. C’est là que l’exposition acquiert sa forme autonome, lorsque le séquençage des Peinture, en un certain sens assemblées, est laissé à la libre interprétation du regardeur, lequel construit dans le passage d’une plaque à l’autre, d’un motif à l’autre, les linéaments d’un récit.
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Pascal Neveux
Commissaire de l’exposition
Directeur du Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur
 

Tags: Li Hui, Adrian Schiess